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À Uachtarain agus a chairde (Chère présidente et amis). Ces paroles chaleureuses et respectueuses ont été prononcées en mai 2011 par sa majesté, la reine Élisabeth II, à l’occasion du banquet d’État organisé au château de Dublin, lors de sa première visite historique en République d’Irlande. La présidente irlandaise, Mary McAleese, fut le premier dirigeant irlandais à inviter la reine à se rendre dans le pays. La présidente fut visiblement surprise par les premières paroles de la reine et laissa échapper un « wow ! » lorsqu’elle entendit la reine parler en gaélique.
La reine continua : « La réalité triste et regrettable est que nos îles, à travers leur histoire, ont subi leur lot de tourments, de troubles et de pertes » (traduction AFP, 2011).
Pourquoi les relations ont-elles été aussi souvent tumultueuses entre les Anglais et les Irlandais ? Une des raisons est qu’ils partagent les mêmes racines ancestrales. Les généalogistes font remonter la lignée d’Élisabeth jusqu’aux rois écossais, puis aux Ard Righ (rois suprêmes) d’Irlande. Pendant des siècles, la maison royale d’Irlande a couronné ses rois à Tara, à l’ouest de Drogheda dans le comté de Meath, sur la même pierre que celle utilisée de nos jours pour couronner les monarques anglais à l’abbaye de Westminster.
Pour comprendre la raison de ces nombreuses luttes fratricides et sanglantes, il faut comprendre la nature des quatre peuples ayant habité l’île d’Émeraude. Voyons qui furent les premiers habitants de l’Irlande.
« Les races qui occupaient le pays lorsque les prétendus Milésiens arrivèrent, principalement les Fir Bolg et les Tuatha dé Danann, n’ont assurément pas été exterminées par les conquérants milésiens » (The Story of the Irish Race, Seumas MacManus, page 1).
Les 3500 ans d’histoire du peuple irlandais sont un des récits les mieux préservés, car celui-ci a été transmis de génération en génération par les seanachies (les bardes ou les ménestrels). Les anciens récits n’ont pas été écrits dans des livres qui pouvaient être détruits, mais ils étaient transmis oralement, sur une rythmique poétique. Ce n’est qu’à partir du 17ème siècle que l’Irlande a possédé une histoire écrite officielle, avec les Annales des quatre maîtres et les poésies préservées des bardes, rapportées par MacFirbis et Keating.
Les Fir Bolg arrivèrent probablement au milieu du 2ème millénaire av. J.-C. Selon Keating, ils descendaient de Magog, fils de Japhet (History of Ireland, Irish Texts Society, livre I, page 139). Certains érudits pensent que ces peuples se seraient associés avec les Phéniciens qui parcouraient les mers et qui étaient connus pour avoir des mines de cuivre, de plomb, d’étain et d’or, dans les îles Britanniques. L’or irlandais est toujours un métal précieux très recherché et de nouvelles mines ont récemment été ouvertes dans les comtés de Tyrone et de Wexford.
La mainmise des Fir Bolg sur l’île fut bientôt disputée par un nouvel envahisseur, les Tuatha dé Danann. Le mot thuata signifie « tribu ». Ils venaient de la tribu de Dan, fils de Jacob.
Dans Juges 5 :17, la juge israélite Débora (env. 12ème siècle av. J.-C.) chantait un cantique dont certaines paroles étaient : « Pourquoi Dan s’est-il tenu sur les navires ? » Les Danites étaient connus pour voyager sur la mer avec leurs voisins phéniciens, sillonnant la Méditerranée et allant même au-delà des « Colonnes d’Hercule » (Gibraltar) sur l’océan Atlantique, jusqu’en Grande-Bretagne et en Irlande. Certains estiment qu’ils ont émigré pour la première fois à partir de l’Égypte, juste avant l’exode (1446 av. J.-C.), suivi d’une seconde vague en 1213 av. J.-C.
Au milieu du 17ème siècle, MacFirbis écrivit que « tous ceux qui sont blonds, de stature imposante, aimant la musique et l’équitation, et pratiquant les arts de la magie descendent des Tuatha dé Danann » (History of Ireland, Thomas Kelly, page 25). Leurs descendants sont peut-être moins impliqués dans la magie, mais ils sont toujours passionnés par les courses de chevaux et la musique irlandaise est toujours synonyme de bons moments autour d’un verre de Guinness !
La vague migratoire suivante arriva à l’époque du roi Salomon (env. 1000 av. J.-C.). La lignée de Salomon remonte jusqu’à Pérets, de la demi-tribu de Juda (voir Genèse 38 :28-30) ; l’autre partie de la tribu voyagea en Asie mineure où ses membres furent connus sous le nom de Milésiens (d’après la ville de Milet). « Ils possédaient un haut degré d’unité politique, avaient un seul roi ainsi qu’une politique extérieure sage et constante » (MacManus, page 7). Les Milésiens combattirent les Danann, ils les mirent en déroute et ils tuèrent leurs trois rois. Ils établirent bientôt leur lignée royale et couronnèrent leurs rois à Tara sur la Lia Fail, ou pierre de la destinée.
Les Milésiens s’établirent plus tard dans le nord. Leurs rois furent appelés les Ard Righ (les “rois suprêmes”, dominant sur les rois inférieurs des nombreuses tribus irlandaises).
L’Histoire rapporte un nombre impressionnant de coutumes et de lois, introduites en Irlande par les Milésiens, qui ressemblaient fortement aux statuts et aux jugements donnés par Moïse aux Israélites, pendant leurs années d’errance au désert (1446-1406 av. J.-C.). En voici quelques exemples :
« Les troupeaux empruntés à un noble […] étaient retournés après sept années » (MacManus, page 293 ; voir Lévitique 25 :1-10).
« La majeure partie du territoire tribal était à la disposition de tout le peuple de la tribu » (ibid., page 293 ; voir Lévitique 25 :34).
« Le système irlandais ressemblait beaucoup au système patriarcal de l’Orient » (ibid., page 294).
« La loi dit que “personne ne sera opprimé dans les difficultés” » (ibid., page 294 ; voir Lévitique 25 :35).
« Il [le prêtre ou le roi] sera sans défaut physique ni difformité » (ibid., page 295 ; voir Lévitique 21 :17-23).
De nos jours, le nom Scot est d’abord associé à l’Écosse (Scotland en anglais, c.-à-d. Pays des Scots), mais pendant des siècles, l’Irlande s’était appelée Scotia. Ce nom vient des Scythes. MacManus a écrit : « Ils [les Gaëls] sont venus d’un grand territoire indéfini, appelé Scythie […] Ils sont arrivés en Irlande en passant par l’Égypte, la Crète et l’Espagne » (ibid., page 8). Pendant leur séjour en Égypte, Niul, le petit-fils de Gaël, épousa Scota, la fille du Pharaon.
Le nom « Gaule » vient lui-même de Gaël et les Grecs appelaient ces peuples les Celtes (Keltoï). Cela classe les Irlandais parmi les grandes nations celtes, aux côtés des Écossais, des Cornouaillais, des Bretons, des Wallons (en Belgique) et des Gallois. On retrouve également la trace des Celtes chez les Suisses, chez les Celtibériens en Espagne et chez les Galates du Nouveau Testament.
Les Ard Righ milésiens emportèrent la pierre du couronnement Lia Fail avec eux à Argyll, en Écosse, en 478 apr. J.-C. et plus tard à Scone. Les Anglais la transférèrent ensuite à l’abbaye de Westminster où furent couronnés la plupart de leurs souverains. De nombreux Écossais sont retournés en Ulster, en Irlande du Nord, par vagues migratoires successives entre 1605 et 1697, au grand mécontentement des Danann actuellement dans la partie sud de l’île.
La référence de la reine au « lot de tourments, de troubles et de pertes » que les Irlandais ont subi entre les mains des suzerains anglais était un bref et rapide rappel des souvenirs amers et des souffrances transmises de génération en génération par les Irlandais du sud. Cependant, sa visite et ses paroles semblent marquer, aux yeux de nombreux observateurs, le signal d’un réchauffement entre ces frères descendant d’Israël.
Cela continuera-t-il ? Seul l’avenir nous le dira.